Une histoire qui nous est arrivée sur le TDM 2023.
Le matin du 7 février, après plusieurs jours de pluie et de temps sérieusement perturbé,
Nous jetons l'ancre à PUERTO MONTT…
Ce matin il fait étonnamment beau! Comme quasi à chaque escale, nous sommes assis à la réception du bateau au 5eme étage, en attendant que nos amis arrivent pour sortir avec eux.
Un homme de la sécurité MSC vient vers nous et demande à ma femme de le suivre… Je pensais que c’était dans l’intention de lui faire part d’un renseignement quelconque…
Ne la voyant pas revenir au bout d’une dizaine de minutes je m’adresse à un bureau de la réception et je demande ce qu’il en est. On me dit que ma femme est avec des agents de la sécurité dans un bureau un peu plus loin. Je me dirige vers le bureau en question et je dis que je viens voir ce qui se passe.
Et là je suis carrément stupéfait, ahuri, de constater que ma femme est entourée d’au moins cinq hommes de la sécurité, une sorte de tribunal en fait, dont le second du commandant, m’annonce avec une sévérité inimaginable qu’il y a un gros problème ! Ma femme est suicidaire et envisage de se jeter par-dessus bord !!!!!!
Je crois d’abord à une plaisanterie mais à regarder les visages sévères, froids, fermés et ultra dramatique des agents je me rends vite compte que nous sommes en train de vivre un début de cauchemar sinon un scénario surréaliste.
On nous annonce froidement que notre présence à bord n’est pas assurée et que les agents ou « tribunal » en question vont étudier, dans la journée si oui ou non nous pouvons poursuivre notre voyage.
En fait à ce moment-là je me dis encore que tout cela est une vaste blague et que tout ça va se terminer par des excuses…
Au bout d’un moment de discussion durant lequel j’explique à ces agents que ma femme, infirmière de métier, n’est absolument pas, mais alors pas du tout, du genre à en venir à se jeter à l’eau ils nous laissent partir…
Nos amis sont arrivés entre temps et nous sortons du bateau pour aller visiter Puerto Montt. Nous trouvons un taxi avec un chauffeur très sympa qui nous fait faire quasiment toute la traversée de cette très belle région.
Nous revenons au bateau en fin d’après-midi après avoir passé une superbe journée.
Quelle n’est pas ma surprise de voir que nous sommes attendus par quasi la même équipe de sécurité qui déjà le matin nous avait interrogés pour nous entendre dire froidement que nous ne pouvons pas rester sur le bateau.
Ils nous confirment toujours aussi sèchement que nous sommes obligés de débarquer avec tous nos bagages !!!!!
Ils nous mènent sous bonne escorte à notre cabine et ils nous ordonnent de faire nos valises sans autre forme de procès et ce le plus rapidement possible puisque le bateau doit partir dans peu de temps. Je n’en reviens pas et je suis littéralement dans un cauchemar. J’ai l’impression que tout cela est du cinéma et que quelqu’un viendra nous dire que c’est une mauvaise plaisanterie… Mais pas du tout !
Sous la garde de cinq agents, y compris le Commandant en second, qui entre parenthèse n’arrête pas de nous dire que nous ne resterons pas à bord, ma femme est contrainte de faire nos valises et ce le plus rapidement possible…
Également plus ou moins sous le choc, dans un état second, elle commence à ranger nos affaires, je l’aide un peu, mais rapidement l’impact psychologique me fait littéralement défaillir, j’ai des vertiges et je m’écroule sur le lit ! Je commence à réaliser tout doucement ce que tout cela signifie…
Nous allons nous retrouver, désemparés, hébétés, seuls, avec nos 6 valises dans un pays, une ville, Puerto Montt, que nous ne connaissons pas, où nous ne parlons pas la langue, où nous aurons un mal fou à nous ressaisir…
D’un coup je me dis ce n’est pas possible.
Je prends ma décision et j’annonce à toute la troupe d’agents de sécurité, qui nous regardent avec toujours autant de mépris et de froideur que je ne descendrai pas du bateau quoi qu’ils fassent.
Le second du commandant m’annonce que dans ce cas ils vont appeler la police.
Je leurs réponds Ok, d’accord, appelez la police, appelez la tout de suite…
Ils discutent entre eux en italien et tout à coup il n’est plus question de police mais ils reviennent à la charge pour nous obliger à faire nos valises. Ma femme est en sueur, elle non plus n’en peux plus, elle demande qu’on ouvre la porte du balcon pour avoir un peu d’air, après hésitation ils s’exécutent mais un agent se met immédiatement devant la porte balcon pour nous empêcher de nous approcher !
Je dis à ma femme d’arrêter avec les valises de toutes façons je ne sortirai pas…
Je répète à nouveau au groupe de gardiens qu’en aucune façon je ne descendrai du bateau ou alors il faudra qu’ils me traînent par terre…
Je veux parler au capitaine. On me répond que le capitaine n’est pas disponible, il est aux commandes du bateau qui doit appareiller au plus vite… Je leurs répond que dans ce cas je veux lui parler dès qu’il sera disponible…
Ils discutent à nouveau entre eux, en italien bien sûr, nous ne comprenons rien, et le chef vient me dire qu’ils vont nous mettre dans une cabine intérieure, sans fenêtre. Une cellule en quelque sorte avec un gardien à la porte. Jour et nuit… Nous ne pourrons pas en sortir et nous y resterons jusqu’à Valparaiso, à savoir durant deux jours et deux nuits. On nous apportera les repas… Nous sommes en prison…
Le lendemain à 8h30 toute l’équipe revient à la charge avec cette fois ci le capitaine. Ce dernier qui ne parle pas français, d’ailleurs pas un seul des membres de sécurité ne parle français, nous informe toujours aussi froidement, sans aucune empathie ni considération qu’il est responsable de la sécurité des passagers et compte tenu du fait que ma femme a été jugée, sans même avoir pu parler ou avoir vu le médecin, comme suicidaire, nous ne pouvons pas rester à bord à moins qu’un psychiatre lui donne son aval.
Nous sommes d’accord avec cette proposition, en toute sérénité.
Rendez-vous est pris par MSC à Valparaíso avec un psychiatre.
Je profite de ce court entretien avec le capitaine pour lui dire que cette façon de nous traiter est honteuse, scandaleuse, inhumaine. Vu mon âge j’aurai pu, sous le choc, faire un AVC dont il aurait été responsable…
Je lui ai dit également d’oublier un court instant sa fonction de capitaine de nous observer, de nous parler, éventuellement de nous interroger pour savoir qui nous sommes, et ce avec les yeux d’un homme normal !
Avons-nous ma femme et moi des airs de personnes anormales, folles, suicidaires ??
Nous sommes motards, nous parcourons entre 15 et 20000 kms par an à moto, nous avons pleins de projets, d’amis, nous avons des enfants … Il a hésité mais n’a pas répondu franchement à ma suggestion, se contentant de me dire qu’il n’était pas médecin… Bref après un conciliabule, en italien bien sur, entre les cinq ou six membres de la sécurité ils sont repartis nous laissant seuls dans notre cellule avec un garde devant la porte.
En fin de matinée on vient nous annoncer que nous allons retourner dans notre cabine où nous étions auparavant mais la porte balcon a été préalablement barricadée, nous empêchant de l’ouvrir… Cela nous a néanmoins quelque peu soulagé. Au moins nous retrouvions la lumière du jour.
Un gardien reste devant notre porte jour et nuit. Le deuxième jour nous avons eu le droit d’aller manger au restaurant toujours sous la garde d’un agent de sécurité. Marie a demandé à faire un peu de marche pour se changer les idées… un gardien l’a accompagnée faire un tour…
Bref nous arrivons à Valparaiso.
On nous a dit d’être prêts à 8 heures du matin, ce que nous étions, on nous fait poireauter toute la journée pour finalement nous prendre en charge à... 4 heures de l’après-midi pour nous amener, sous escorte, en taxi, chez le psychiatre concerné.
Le taxi devait nous coûter 150€ et le psychiatre 350€…
Nous n’avions pas d’argent sur nous donc nous étions incapables de payer.
Notre « escorte » a téléphoné au bateau qui lui a sans doute dis que le paiement sera provisoirement pris en charge par MSC pour être mis ensuite sur notre facture…
Arrivés chez le psychiatre (dont j’ai conservé les coordonnées) nous avons eu le grand plaisir d’apprendre qu’il parlait parfaitement allemand, langue que nous parlons également, et que donc nous n’avions pas besoin d’interprète. Notre gardienne est restée dans la salle d’attente, en compagnie de l’agent local MSC qui nous avait rejoint entre temps.
Elle s’est contentée de remettre au psychiatre une lettre écrite par le médecin du bateau.
Le psychiatre désirant nous voir seul. Il a lu la lettre de MSC, nous a regardé, nous a interrogé sur notre façon de vivre, nos projets, il n’a pu s’empêcher de sourire en comparant ce qu’il venait de lire et ce qu’il constatait en nous voyant et en nous écoutant.
Nous avons pu lui expliquer clairement qui nous étions que nous menions une vie tout à fait normale. Que j’étais passionné de moto, que nous faisions des balades ensemble, que nous avions de multiples projets, etc….
Le contraste avec la lettre l’a laissé dubitatif. Il y avait marqué sur cette fameuse lettre de MSC, rédigée par la médecin de bord, qui n’a ni vu ni interrogé ni même parlé à ma femme que cette dernière était profondément malheureuse, désespérée depuis plus de vingt ans et qu’elle ne pensait qu’à mourir… Qu’elle était dans un état de dépression profonde, etc…
Le psychiatre a un peu rigolé de tout ça et a mis une grosse croix sur la case disant que nous pouvions sans aucun risque poursuivre notre voyage.
Nous sommes retournés au bateau… Et depuis plus rien.
Un officier d’équipage, très sympathique (un des très rares) est venu me serrer la main et m’a même pris dans ses bras sachant ce qu’on nous avait fait subir…
Et tout ça pourquoi ?
Parce que le matin de ce fameux 7 février, à notre arrivée à PUERTO MONTT il faisait beau après 4 ou 5 jours de temps exécrable, pluies, vent, froid, etc… Ma femme, Marie, discutant avec l’employée de MSC, citée plus haut, lui dit sur le ton de la plaisanterie, « quelle chance, il fait beau pour notre débarquement à PUERTO MONTT, ces derniers jours ce mauvais temps donnait presque envie de se jeter à l’eau !!!!!
«Presque envie de se jeter à l’eau »
"She wants to jump over the balcony"
C’est tout ce que cette personne totalement, irresponsable et incapable de
comprendre une plaisanterie a retenu.
Immédiatement elle a alerté la sécurité en affirmant qu’elle venait de discuter avec
une passagère qui voulait se suicider,
« Se jeter à l’eau » !!!!
Personne, jamais, ne m’a, ne nous a, traité avec autant de dédain, de mépris et de brutalité d'inhumanité.
Je sais que j’en resterai traumatisé pour le restant de mes jours.
Pour couronner le tout, non seulement cette histoire est honteuse et inhumaine mais elle nous a gâché tout notre voyage.
Elle s’est sue rapidement…le bateau avait pris près de 2 heures de retard à cause de nous.
Partant du principe qu’il n’y a jamais de fumée sans feu, les bruits se répandant comme une traînée de poudre, rapidement déformés…
Durant le reste du voyage ma femme s’est vue traitée de « la folle suicidaire du bateau », de malade,, etc…
Cela nous a été rapporté par de nombreux amis qui peuvent en témoigner…
J'ai eu l'occasion, peu de temps après d'évoquer cette histoire avec le Capitaine Commandant, en tête à tête. Il m'a carrément dit, avec un sourire, que tout est oublié... c'est du passé, etc... Je lui ai répondu que, pour lui peut être mais pour moi, jamais...
Notre sérénité, de ma femme et de moi, ont été totalement détruits par cette terrible aventure…
Nous disposons des coordonnées de nombreux amis qui sont prêts à témoigner de ce dramatique évènement.
Nous avons également tous les noms des protagonistes de l’affaire, y compris celui du chef de la sécurité et celui du psychiatre de Valparaiso.
Il est bien évident qu’après cette terrible aventure nous attendons au minimum des excuses et la reconnaissance que notre Tour du Monde 2023 a été lamentablement et injustement gâché.
